Des chercheurs du laboratoire Anthropologie bio-culturelle, droit, éthique et santé (Aix-Marseille Université / CNRS / Etablissement français du sang) et du laboratoire de Biomécanique appliquée (IFSTTAR / Aix Marseille Université) ont effectué des analyses en élément-fini afin de simuler numériquement des accouchements d'australopithèques et révéler l’origine précoce de la complexité de la naissance humaine.
Une naissance humaine complexe
La naissance n’est pas seulement une des expériences les plus intenses qu’il est donné à vivre au cours de l’existence, c’est aussi un événement extrêmement complexe qui s’inscrit dans notre histoire évolutive impliquant étroitement phénomènes biologiques et culturels. L’accouchement chez les humains est d’autant plus remarquable qu’il possède des spécificités qui le distinguent de celui des autres primates. La difficulté de l’accouchement humain n’est, en effet, pas retrouvée chez les autres grands singes, et rarement chez les autres primates. A l’issue de cet accouchement complexe, les mères humaines donnent naissance à un nouveau-né considéré comme « immature » étant donné ses caractéristiques neurologiques, expliquées notamment par la taille de son crâne très faible en regard de sa future taille adulte.
Au cours de l’évolution humaine, la naissance de nouveau-nés possédant de petits crânes semble répondre à un impératif évident : celui de pouvoir franchir sans encombre le bassin maternel à la forme complexe. Cette nécessité semble être liée à l'acquisition de la bipédie qui a restructuré l'architecture du canal d'accouchement. Pour tester cette hypothèse, l’étude des australopithèques est idéale, car ces hominines sont déjà bipèdes, mais ont encore un cerveau plutôt petit à l’âge adulte. Pour ce groupe fossile, il est donc possible d’étudier l’influence de la bipédie uniquement, sur la proportion de la taille crânienne néonatale vis-à-vis de la taille adulte.
Simulation numérique d’accouchements australopithèques
Suite aux analyses en élément-fini menées par les chercheurs, afin de simuler numériquement des accouchements d'australopithèques avec différentes gammes de taille crânienne néonatale, il s'avère que les australopithèques devaient avoir, comme les humains modernes, une proportion plutôt faible entre taille crânienne néonatale et taille crânienne adulte. Cela suggère que la coopération dans la prise en charge des nourrissons au sein du groupe serait apparue précocement dans l'évolution humaine, impliquant des fonctions sociales élaborées. La bipédie semble donc être le point de départ de l'acquisition de ces nouvelles compétences cognitives supérieures.
Publication parue le 19 avril 2022 dans Communications Biology.
Référence : Frémondière, P., Thollon, L., Marchal, F. et al. Dynamic finite-element simulations reveal early origin of complex human birth pattern. Commun Biol5, 377 (2022).