Aller au contenu principal
Abeilles

L'abeille survolant un miroir perd son altitude et s’écrase

Les abeilles, surprises lors du survol d’un miroir, perdent inexorablement de l’altitude jusqu’à entrer en collision avec le miroir. C’est ce qui a été démontré par une équipe interdisciplinaire de chercheurs français de l’Institut des sciences du mouvement – Etienne-Jules Marey (CNRS/Aix-Marseille Université) et du Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (CNRS / Université de Montpellier / IRD / EPHE).

Temps de lecture : 3 minutes

Comment les abeilles ajustent-elles leur altitude ?

Qu’est-ce qui a poussé les chercheurs à imaginer une expérience pour le moins originale ? Tout comme un aviateur pilotant à vue, les abeilles se servent de leur vision pour ajuster leur altitude. Elles exploitent pour cela différentes variables disponibles dans le flux optique généré par leur déplacement dans l’environnement. L’une de ces variables - la vitesse de défilement optique du sol - dépend de l’altitude à laquelle l’abeille vole, et est utilisée pour contrôler son altitude. Les chercheurs ont alors imaginé manipuler cette vitesse de défilement optique du sol en l’annulant pour observer si les abeilles pouvaient voler dans cette invraisemblable configuration environnementale.

La configuration mise en place est la suivante : les abeilles sont entraînées à voler dans un tunnel avec des friandises sucrées en guise de récompense à la clé, puis divers éléments des parois du tunnel au sol ou au plafond sont remplacés par des miroirs pour leur faire croire que le sol est deux fois plus bas, voire projeté à l’infini vers le bas. En observant ce qu’il se passe, le résultat est sans appel : sans « cette vitesse de défilement optique du sol », les abeilles tombent ou rebondissent sur le miroir, certainement à la recherche du sol.

Une expérience originale et sans danger pour les abeilles

Cette configuration optique n’est pourtant pas si invraisemblable que cela. Il y a 60 ans, Herbert Heran, un entomologiste autrichien, et Martin Lindauer, un spécialiste allemand du comportement, avaient entraîné des abeilles à voler au-dessus d’un lac. Lorsque des risées à la surface du lac ou un pont de planches offraient des contrastes visuels, les abeilles traversaient le lac. A l’inverse, lorsque la surface du lac était lisse comme un miroir, les abeilles volaient de plus en plus bas jusqu'à entrer en contact avec la surface de l’eau.

Toute l’originalité de ces travaux réside dans la conception de configurations optiques contrôlées et manipulables se rapprochant au mieux des conditions naturelles de vol des abeilles, sans pour autant avoir besoin d’un lac ou de sacrifier des abeilles pour étudier le contrôle d’altitude. Julien Serres explique qu’il faut tout d’abord être certain de pouvoir mettre en défaut la régulation d’altitude des abeilles pour ensuite leur proposer d’autres informations optiques, puis étudier leur combinaison pour décrire le contrôle d’altitude.

Étudier les abeilles pour aider les pilotes

Cette expérience inédite et réalisée de manière contrôlée, fait ainsi écho aux nombreux accidents d’aviateurs ou pilotes rencontrant des difficultés à percevoir le sol lorsque ce dernier n’est plus texturé (désert de dunes, neige, lac…). Elle vise à mieux comprendre comment combiner plusieurs informations pour contrôler visuellement l’altitude afin de développer des assistances au pilotage ou d’automatiser le vol. Enfin, cette étude confirme aussi de manière surprenante que le meilleur moyen d’échapper à un essaim d’abeilles demeure le plongeon dans l’eau, toutefois, en évitant de faire trop de vagues !

Crédit : © Julien Serres, Institut des sciences du mouvement – Étienne-Jules Marey (CNRS/Aix Marseille Université)
Manipulation optique au moyen de deux miroirs se faisant face. L’illusion d’optique projette le sol à l’infini vers le bas supprimant toute information visuelle au sol lorsque les abeilles tentent de traverser le tunnel. - Crédit : © Julien Serres, ISM
Contact à ajouter
Nom
Nom
Serres
Prénom
Julien
Fonction
Fonction
Maitre de conférences AMU à l’Institut des sciences du mouvement – Etienne-Jules Marey (CNRS/Aix-Marseille Université)