L’urbanisation peut être vue comme le fruit de la hausse de la productivité qui attire les travailleurs vers les villes. Les économistes Cecilia García-Peñalosa et Liam Brunt montrent que pour comprendre les débuts de la révolution industrielle il est important d’examiner ce phénomène dans l’autre sens : gains de productivité et croissance sont favorisés par les échanges de connaissances au sein des villes.
Selon l’Organisation des Nations Unies, plus de la moitié de la population mondiale habite dans des villes, soit 4,2 milliards d’habitants. Dans les prochaines décennies, la tendance devrait s’accentuer pour atteindre 66 % de la population mondiale en 2050. Les villes sont au cœur de la croissance puisqu’elles génèrent plus de 80 % du PIB mondial. Les économistes ont largement documenté l’attirance des travailleurs vers les villes afin de bénéficier des salaires plus élevés. Plus simplement, l’urbanisation a longtemps été vue comme une conséquence de la croissance économique. Mais cette relation est peut-être plus complexe.
Les économistes Cecilia García-Peñalosa et Liam Brunt ont combiné des problématiques à la croisée de l’économie du développement et de l’économie géographique pour explorer avec un nouveau modèle les liens entre l’urbanisation et l’innovation, c’est-à-dire, la création de nouvelles idées et technologies. Leur objectif est de comprendre comment ces deux facteurs ont interagi au moment où la croissance économique a commencé à prendre de l’ampleur, à l’aube la révolution industrielle. Si la conjoncture des premiers pays à s’industrialiser est différente des pays à bas revenus aujourd’hui, cette étude pourrait néanmoins permettre d’apporter un éclairage sur les bénéfices de l’urbanisation dans des pays encore majoritairement ruraux.
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Dialogues économiques est une revue numérique de diffusion des connaissances éditée par Aix-Marseille School of Economics (AMU, CNRS, EHESS, Centrale Méditerranée) Passerelle entre recherche académique et société, Dialogues économiques donne les clefs du raisonnement économique à tous les citoyens. Des articles sont publiés tous les quinze jours.
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Plus d’interactions sociales, plus d’idées
Les chercheurs se sont intéressés à l’Europe, et notamment à l’Angleterre, car les données montrent une augmentation du taux d’urbanisation et de la taille des villes avant la révolution industrielle. Leur modèle considère une économie avec un secteur agricole et un secteur manufacturier, dont la production est assurée respectivement par les zones rurales et par les villes. Deux mécanismes entrent en jeu. D’abord, le secteur manufacturier est décrit comme une activité artisanale traditionnelle, indépendante de la production industrielle moderne. La productivité des travailleurs manufacturiers dépend uniquement du nombre d’idées qu’ils possèdent. Cette productivité augmente à mesure que le nombre d’idées disponibles augmente, ce qui fait monter les salaires et incite les travailleurs agricoles à quitter la campagne pour les villes. Par conséquent, la hausse du nombre d’idées entraîne une augmentation de l’emploi dans le secteur manufacturier et du taux d’urbanisation.
Article initialement paru dans la revue Dialogues Économiques, le 10 janvier 2024.
Référence : Brunt L., García-Peñalosa C., 2022, « Urbanisation and the Onset of Modern Economic Growth ». The Economic Journal, 132 (642), 512-545
Photo d'entête par Jovannig sur Adobe Stock.